

In Bastia cum’È trÀ A Corsica SANA, l’associu Endur’Ensemble s’impegna – dapoi piÙ d’un decenniu – À fiancu À e donne culpite da u cancaru di u pettu. Spurtelli di cure, spaziu d’ascoltu, appiecazione numerica, corse sulidarie ANCU sin’À u Maroccu : iniziata da un’anziana paziente, st’andatura VIAGHJA CÙ un fraiutu vivu, arradicatu ind’È L’UMANITÀ È a sperienza -CUSÌ DURA- di a malatia.
Par Petru Altiani
À première vue, c’est un salon comme un autre. Un canapé, une bouilloire, quelques fauteuils, une lumière douce. Et pourtant, le cocon n’a rien d’ordinaire. À Furiani, résidence Campo Meta, ce lieu d’accueil ouvert, en juin dernier, par Endur’Ensemble est réservé aux femmes atteintes d’un cancer ou en rémission. Un espace de répit où l’on vient souffler, loin de l’hôpital et des prescriptions.
« Le cocon, c’est un endroit pour parler, ou ne pas parler. Pour être simplement là, sans injonction ni blouse blanche », résume Carole Pistorozzi, vice-présidente de l’association fondée par son mari, Thierry, en 2011, à l’occasion d’un premier défi solidaire et sportif reliant en courant Ersa à Bunifaziu, au profit de Lauriane, une petite fille en situation de handicap. « Certaines viennent pour échanger, d’autres pour se faire chouchouter. On propose parfois une manucure, ou un réassort de produits adaptés. » Les bénévoles, comme Isaline, accueillent les femmes deux jours par semaine – lundi et mercredi – dans un climat d’écoute et de bienveillance. « Être ici, ça m’aide à oublier mes douleurs. Et puis, je me sens utile », dit-elle.
Dans les pièces voisines, deux kinésithérapeutes spécialisées accompagnent les patientes opérées, dans le cadre du Réseau des Kinés du Sein (RKS). « Après une mastectomie ou une tumorectomie, la kiné, ce n’est pas accessoire : c’est indispensable. Il faut un savoir-faire spécifique, des gestes adaptés à des corps fragilisés », poursuit Carole Pistorozzi. Ce lien entre soins médicaux et soutien informel fonde la singularité de ce lieu. Dès ce mois de septembre, des ateliers de nutrition et de sexologie viendront encore enrichir l’offre.
Des paniers de dignité
À l’origine de l’association, il y a un besoin. Celui de continuer à prendre soin de soi, malgré la maladie, malgré la précarité. En 2020, alors en chimiothérapie, Carole Pistorozzi découvre un sérum pour la repousse des cils, validé par son oncologue. Enthousiaste, elle le recommande à ses amies de l’hôpital. « Quand j’ai dit le prix, une d’elles m’a répondu : “Avec ça, je paie les goûters de mes enfants pour un mois.” J’ai compris qu’on vivait la même chose, mais pas dans les mêmes conditions », explique-t-elle.
De cette prise de conscience naît l’idée des paniers : une sélection de produits essentiels -gels apaisants, crèmes pour les mains, soins adaptés aux effets secondaires – distribués gratuitement dans les quatre hôpitaux et cliniques de Corse. Grâce à un partenariat durable avec les pharmacies Pharmabest de Bastia, Ajaccio et Porto-Vecchio, l’association remet aujourd’hui 450 paniers par an.
Pour Patricia, ancienne patiente et désormais bénévole, ce soutien a tout changé. « C’est la seule association que j’ai croisée en un an de chimio. Ces produits ont adouci mes traitements. Ça m’a donné envie de m’impliquer à mon tour. »
Le Relais Corse, le samedi 11 octobre
Autre pilier de l’association : le Relais Rose. Cette course solidaire de 103 kilomètres entre Patrimoniu et Bastia a vu le jour en 2020, à l’initiative de Thierry. L’année de la maladie de son épouse, il décide de courir seul, en silence, pour « prendre un peu de son fardeau ». Le geste, personnel, devient collectif l’année suivante. « Thierry était blessé, je finissais mes traitements. J’ai proposé à mes amies de faire un relais entre nous, chacune 8 ou 10 kilomètres, avec un petit sponsor. »
De fil en aiguille, le défi prend de l’ampleur. En 2022, la course s’ouvre au public et rejoint la dynamique d’Octobre Rose. En 2024, près de 700 participants – coureurs, marcheurs, cyclistes – prennent part à l’événement. Tous les profils s’y retrouvent, du sportif de haut niveau au malade en convalescence. « Ce n’est pas une course comme les autres », insiste Carole. « C’est un moment de vie. »
Au sein de cette foule, une équipe pas comme les autres, également, ouvre la marche : la Team du Relais Rose. Dix-huit femmes, soignantes, patientes ou anciennes malades, forment la seule équipe autorisée à dépasser la règle des huit relayeurs. « Je pense aussi à la désormais légendaire Team Urgences… La seule condition, c’est que ce soit la fête. Que ce soit la vie qui l’emporte. »
Chaque année, les clubs insulaires y participent de plus en plus nombreux avec des athlètes renommés, à l’image de Guillaume Peretti, Anthony Quilici ou encore Loïc Leonardi. « Même eux sont bouleversés par les témoignages sur le parcours. Ce n’est pas qu’une performance, c’est un hommage vivant », ajoute Thierry, qui, une semaine avant le Relais Rose – prévu le samedi 11 octobre – entamera un girusymbolique du dépistage à travers l’île. Toujours détenteur du record du tour de Corse en courant – 155 heures en 2016 -, il sera accompagné d’un camion de sensibilisation et d’un bus dédié, en partenariat avec la CPAM de Haute-Corse et la Collectivité de Corse, pour rappeler l’importance du dépistage, notamment dans une région encore en retard.
La version saharienne en avril 2026
Depuis 2022, un relais semblable a vu le jour au Maroc, autour de Ouarzazate. L’Ultra Trail Relais Maroc (UTRM) reprend le même format, la prochaine édition se courra en avril 2026 : 103 kilomètres en relais de 2, 4 ou 8, ou en solo, mais cette fois dans le désert. « On y retrouve le même esprit, mais adapté au contexte local, où la communication est plus discrète. »
Là-bas, l’objectif reste le même : apporter une aide concrète aux femmes. Des produits de soin sont distribués dans les dispensaires environnants, notamment en palmeraie. Des coureurs corses y participent aussi. « Guillaume Peretti, par exemple, l’a couru en solo. Il a souffert de la chaleur, de l’altitude, mais il est allé au bout. »
Une application mobile née d’une urgence
À l’automne 2025, Endur’Ensemble lancera une application mobile dédiée à l’accompagnement des patientes atteintes d’un cancer du sein. Le projet, conçu avec la société ajaccienne Good Barber, a germé dans une situation critique. « Un ami bénévole, Martin, a eu un myélome pendant le Relais Rose. Grâce à nos contacts, on a pu le faire soigner très vite. Mais si on n’avait rien su ? », se remémore Carole.
L’application, gratuite, référencera en temps réel tous les professionnels utiles : gynécologues, infirmiers, kinés du sein, psychologues, cardiologues, taxis, ambulanciers. L’outil, géolocalisé, permettra aux patientes d’accéder rapidement à des soins adaptés. « Si je tape “gynéco” à Furiani, je verrai le plus proche. On espère que ça soulagera les femmes, mais aussi leurs proches. »
Le développement a nécessité des centaines d’heures de saisie manuelle. « C’était fastidieux, mais indispensable. Le numérique peut aussi être un outil de soin », souligne Carole.
À bout de bras
Endur’Ensemble fonctionne grâce à une cinquantaine de bénévoles « actifs au moins une fois par an », mais les besoins sont plus importants. « Pour le cocon, on cherche des personnes disponibles en demi-journée, même une fois par mois. Quand personne n’est là, c’est moi qui m’en occupe, j’y consacre tout mon temps », soupire la vice-présidente, qui gère l’association quasi à plein temps.
Les financements publics restent limités. Quelques communes apportent leur soutien : Bastia, Patrimonio, Borgo, Biguglia. La Collectivité de Corse aussi, notamment pour les actions liées au dépistage. Mais le geste le plus marquant reste, pour Carole, celui de la petite commune d’Olmeta di Capicorsu. « Chaque année, la maire nous remet un chèque de 100 euros, au moment du passage de la course. C’est celui qui me touche le plus. Sans oublier tous les partenaires privés grâce auxquels aussi tout est possible. »
L’envie de transmettre
Le relais de l’engagement se transmet de femme en femme. Patricia en est convaincue : « On ne vit pas la maladie de la même façon, mais on peut se comprendre. J’ai envie d’aider celles qui arrivent après moi. » Elle évoque ses chevaux comme « meilleure thérapie », son envie de transmettre, son expérience des soins.
Pour Isaline, le lien est ailleurs, mais l’élan est identique : « J’ai eu un accident qui m’a laissée avec des douleurs chroniques. Participer à l’association me fait du bien. Je pense à autre chose. Je me rends utile. »
« Rien n’est jamais dû au hasard »
Du cocon à l’application, en passant par les relais ou les paniers, toutes les initiatives d’Endur’Ensemble sont nées d’un vécu. D’un manque ressenti. D’une urgence partagée. « On ne crée rien par hasard. Chaque projet répond à quelque chose que j’ai traversé ou observé chez d’autres », confie Carole Pistorozzi.
La force d’Endur’Ensemble tient dans cette fidélité à l’expérience vécue. Dans cette solidarité incarnée. Une main tendue, toujours. Une chaîne humaine, patiente, discrète mais tenace, qui rappelle que la maladie ne rompt pas les liens : elle en révèle la nécessité…
Savoir +: https://endurensemble.com