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Écrire, sabre au clair

À la une Il arrive parfois que dans un pied de nez involontaire le passé romancé entre quelque peu en résonance avec l’actualité. Une sorte de clin d’œil du présent au passé. Voilà quelque deux siècles, Napoléon est à la croisée des chemins. Sous son regard, un régime politique en mutation. Certes aujourd’hui la République ne bascule pas vers le Consulat, mais une situation parlementaire et gouvernementale insolite donne parfois à l’imaginaire d’un auteur les atours d’une actualité brûlante. Par Vincent de Bernardi   Il est sans doute l’un des auteurs les plus prolifiques de Corse. Récits ou romans, il vient de publier son 7e ouvrage en 12 ans. Jean-Pierre Nucci est un auteur atypique. Coach sportif, il remet ses clients en forme, auteur, il stimule l’imagination de ses lecteurs à travers ses livres. Son dernier opus, Le choix du sabre, paru aux éditions Erick Bonnier en juin dernier, nous emmène de la Haute-Égypte à Marengo. Bonaparte tisse sa légende. Il s’inscrit dans la suite du précédent Le désert sans la gloire, racontant la bataille des pyramides d’Égypte. Jean-Pierre Nucci fabrique des fictions avec un matériau historique dont il a la passion. En bon ajaccien, l’épopée impériale est sa toile de fond. C’est un voyage du Caire à Gênes, en passant par Milan et San Giuliano, jusqu’à Marengo que nous fait vivre l’auteur. En moins d’une année, le destin de Bonaparte se forge. La France bascule de la République au Consulat, avec l’avènement de l’Empire en ligne de mire. Sans être historien, ni expert militaire, il plante son décor avec une précision stupéfiante, insérant ses personnages dans un univers où l’analyse politique sous-tend le récit. Car il faut bien l’avouer, Jean-Pierre Nucci est aussi un passionné de politique. Avec ses deux romans, à travers ses personnages, il raconte une France qui bascule, qui se redresse en devenant conquérante. Corse ambivalente Préfacé par le Prince Joachim Murat, ce miracle de Marengo n’est pas réservé qu’aux amateurs de récits historiques, de tactique militaire, d’épopées napoléoniennes. C’est aussi un roman pour ceux qui aiment l’aventure, avec ses héros, impétueux, intrépides, conscients de vivre l’Histoire en train de se faire. Dans ses précédents romans, Monteggiani, La Guardiola et Bastarda, il racontait des destins familiaux dans une Corse décrite avec un brin de nostalgie. Mais là aussi, la politique est présente, en arrière-plan. Davantage l’histoire sociale d’une Corse sclérosée par ses traditions, tiraillée entre son identité et sa tentation d’être arrimée à la République. C’est un trait commun dans l’œuvre de Jean-Pierre Nucci. Dans chacun de ses personnages, il y a un « sujet » politique, inséré dans un contexte historique. Mais à chaque fois, cela nous dit, un petit bout, de ce que nous sommes aujourd’hui. C’est une préoccupation forte chez lui. Son regard sur la Corse d’aujourd’hui en est empreint. Jamais avare de discussions, il aime la controverse dès lors qu’elle fait progresser le débat. Discuter un soir d’élection avec Jean-Pierre Nucci promet toujours une longue séance d’échanges stimulants.   Hier et aujourd’hui En vrai démocrate, il s’interroge, questionne, propose, fait des liens entre le passé et le présent. Il a cette conscience aiguë que sans responsabilité individuelle, point de salut. C’est d’ailleurs ce qui explique son parcours si singulier, toujours sabre au clair ! On pourrait dire que pour lui, le corps et l’esprit sont inséparables. Mens sana in coproresano colle assez avec sa philosophie de vie. Bourreau de travail, jamais à sec d’une idée, il prépare son prochain ouvrage. Et on se plaît à rêver qu’une telle saga napoléonienne se traduise en série télévisée. Le choix du sabre, Le miracle de Marengo, éditions Erick Bonnier, 2022

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